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Petite réflexion sur le bruit

14.04.2020

Le bruit c'est un peu une métaphore de notre époque depuis les vingt ou trente dernières années. Un élément omniprésent, une condition d’existence dans laquelle notre monde hyperactif, hyper-productif, hyper-communicatif, nous enferme, nous fige. Un état de confusion que l'on retrouve d'ailleurs incarné – transcendé – conjuré – dans beaucoup de domaines artistiques. 

Alors dans la musique, dans les images, dans les récits, c'est beau le bruit. Ça peut être un magnifique exutoire, un voyage du sublime à l’insoutenable, le moyen d'une profonde introspection, un lieu de communion... 

Mais dans la vie c'est une souffrance aussi. Pour celles et ceux qui vivent aux abords des autoroutes, qui travaillent dans les usines, le bruit est monstrueux, il est inhumain. Dans les espaces saturés de communication, il empêche de voir, d’entendre, de réfléchir, de formuler une pensée audible. C’est même, dans certaines prisons, un outil de torture qui fait perdre la raison.

Depuis quelques années, dans les pratiques artistiques, le bruit semble s’enfermer, se figer doucement dans une sorte d'arrière-garde conservatrice. Comme s’il jouait en boucle ses mêmes effets usés, devenus purement esthétiques. Comme s’il se raidissait dans ses propres schémas dogmatiques. Comme si on en percevait désormais les limites.

Pas si libre, pas si infini que ça, le bruit. À la fin, en tant que parti-pris artistique, on l'enterrera, lui aussi.

Alors peut-être qu’on aurait besoin d’arrêter un peu d’en produire juste pour en produire, dans l’art autant que dans la vie. Ou de ralentir au moins, pour chercher à la place de nouveaux repères audibles, palpables, discernables... Des rochers bien solides auxquels on pourrait s'accrocher, pour ne pas se noyer dans la vague qui nous arrive en pleine figure.

Une tentative au moins, de s'ancrer dans le présent et d’appréhender l'avenir. Pas facile.

Et puis, même si on en produisait moins, il resterait toujours du bruit. Celui du vent dans les arbres, du flot des rivières, des rires des enfants, du ronronnement du chat…